Un espace immersif bruxellois au service des entrepreneurs
À partir d’octobre 2024, FARI ouvrira les portes de sa « Cave » à la Gare Centrale de Bruxelles. Dans cet espace immersif de 150 m², l’institut d’intelligence artificielle de la VUB et de l’ULB pourra reproduire l’espace public de la capitale, ainsi que des bâtiments et des parties de quartiers bruxellois, dans le but de simuler et d’analyser, à l’aide de l’IA et de données enrichies, de futures interventions dans le tissu urbain. L’accent reposera essentiellement sur la recherche au service des autorités publiques et des riverains dans un premier temps, mais d’autres missions et partenariats avec des entrepreneurs et architectes sont en cours de préparation.
Au cours des cinq dernières années, la Vrije Universiteit Brussel et l’Université Libre de Bruxelles ont œuvré à la création de l’institut FARI. « Fari – abrégé d’AI for the Common Good Institute – concrétise notre volonté d’apporter un soutien structurel aux défis de l’innovation », explique Hans De Canck, directeur de la VUB. « L’évolution de la Région de Bruxelles-Capitale vers le statut de ville intelligente revêt dans ce cadre un caractère très important. Les programmes de recherche consacrés à cette thématique spécifique ne cessent en effet de se multiplier. Nous sommes en outre convaincus que l’IA et la robotisation contribueront d’autant mieux à la transformation réussie de la capitale que nous sommes aujourd’hui en mesure de collecter presque toutes les données possibles sur Bruxelles et de les visualiser grâce à la nouvelle infrastructure de la CAVE. Les autorités tant bruxelloises que nationales soutiennent en effet cette initiative, qui nous permettra non seulement de puiser dans des données SIG et BIM, mais également d’exploiter des informations sociales, économiques et sur la biodiversité, et même des données en temps réel de type réseaux sociaux, météo, mobilité… Nous espérons aller encore plus loin à l’avenir en collaborant également avec les entrepreneurs et architectes et en échangeant des informations avec eux. Notre objectif ultime est en effet de donner un visage au ‘jumeau numérique’ de Bruxelles, et ce jusqu’au microniveau – c’est-à-dire en incluant des informations détaillées sur les bâtiments et les infrastructures. »
Simuler et prévoir les impacts
Concrètement, la CAVE (Computer Augmented Virtual Environment) est un espace immersif équipé de trois écrans géants sur lesquels est projetée (à l’instar des applications de réalité virtuelle) une fidèle copie numérique de la réalité. À l’aide de l’IA et d’ensembles de données externes, cette technologie recrée des situations existantes de la Région de Bruxelles-Capitale, simule des modifications et prédit l’impact de ces changements. « Cela peut aller de bâtiments auxquels on ajoute une dimension touristique jusqu’à l’association d’informations sur les subventions à des rénovations énergétiques ou des travaux d’entretien », indique Hans De Canck. « Les possibilités sont légion. Ainsi par exemple, il est également possible de simuler l’impact de travaux de voirie, de plans de mobilité, de l’augmentation des espaces verts, de l’occupation temporaire de l’espace public par des chantiers, de l’implantation de nouveaux bâtiments, de catastrophes naturelles, de crises sanitaires, de pannes d’infrastructures, de réseaux d’énergie, etc. Le grand avantage de la CAVE de FARI est qu’elle ne nécessite pas le recours à des lunettes de réalité virtuelle. Non seulement ces lunettes donnent littéralement la nausée à bon nombre de gens, mais elles constituent souvent un obstacle à une véritable communication entre les participants sur ce qu’ils voient, chacun étant confiné dans son petit univers. Dans notre espace immersif, six à huit personnes peuvent visionner les projections en même temps et donc en discuter directement. Tout cela ouvre la porte à de nombreuses applications : initiatives touristiques, formations, concertations entre autorités-entrepreneurs-architectes, projets de recherche, … »
Service aux acteurs de la construction
Dans un premier temps, la CAVE de FARI servira à soutenir, en collaboration avec les autorités bruxelloises, les efforts de panification urbaine et d’engagement des citoyens. « Nous pensons essentiellement à la simulation de situations de crise et de changements majeurs dans le tissu urbain », souligne Hans De Canck. « Mais nous souhaitons également démarrer plusieurs projets de recherche. Nous avons ainsi établi de premiers contacts avec Buildwise en vue d’une collaboration visant à examiner les possibilités de l’IA et de la visualisation de données pour la construction. Nous avons par ailleurs l’intention d’accompagner les projets d’innovation des entreprises. Dans certains cas, ceux-ci peuvent bénéficier du demi-million d’euros de subventions européennes que la CAVE reçoit du budget du plan de relance précédemment alloué. Citons notamment les projets Innoviris tels que ‘Brickebots’, que l’ULB et la VUB réalisent en collaboration avec Besix et qui consistent en l’occurrence à étudier la coopération entre les robots et les humains dans le domaine de la construction. Mais nous serons également heureux de mettre notre technologie et nos connaissances au service de consortiums d’entreprises de construction, idéalement en collaboration avec Buildwise. Dans ces cas précis, il s’agirait certes d’un service payant, mais nous sommes convaincus que cet investissement sera largement rentabilisé. Nous disposons notamment de données SIG souterraines permettant aux entrepreneurs de localiser les canalisations existantes ou les endroits où il conviendrait d’installer de nouveaux égouts, par exemple. Les modèles d’IA prédictive permettent par exemple de voir quelle implantation offrira le meilleur résultat en termes de mobilité, de consommation d’énergie, d’évacuation des eaux… Les équipes de construction peuvent facilement tester différents scénarios dans la CAVE, notamment pour le stockage sur chantier, le placement de grues, l’exécution de travaux spécifiques, …. Pour les rénovations de bâtiments anciens, nous pourrons parfois pallier partiellement l’absence de plans en reconstituant numériquement le bâtiment. »
Pas à pas vers un système open source
La CAVE de FARI présente également l’intérêt de pouvoir fournir aux architectes et entrepreneurs, grâce à la centralisation de toutes sortes de données, des indications sur des éléments auxquels ils ne prêteraient peut-être pas intuitivement attention aujourd’hui. Hans De Canck : « Je pense notamment aux effets indésirables générés par l’emplacement d’un bâtiment. Peut-être se situe-t-il à l’endroit d’un îlot de chaleur et nécessiterait-il dès lors plus d’isolation que prévu. L’architecte pourrait également vérifier si certains ajustements apportés à la conception, l’ajout de verdure ou certaines interventions architectoniques permettraient de réduire cet effet de réchauffement. Dans le cas de restaurations, l’IA nous permettra par exemple aussi de montrer, certaines images existantes à l’appui, à quoi ressemblaient autrefois certains ornements. Et ce ne sont là que quelques-unes des nombreuses possibilités. Nous espérons que de tels projets inciteront les entrepreneurs à mettre également leurs modèles BIM à la disposition de la CAVE de FARI. Cela nous permettrait de continuer à affiner notre ‘jumeau numérique’ jusqu’à dresser un réel inventaire du patrimoine bruxellois au niveau le plus fin. L’objectif est en effet d’améliorer encore à l’avenir l’efficacité et la rapidité des modifications et des rénovations urbaines. Sans compter qu’un tel échange nous permettrait d’apprendre de nos erreurs respectives. Notre objectif ultime est d’aboutir à un système open source, mais nous n’y sommes pas encore. L’IA s’accompagne d’un grand nombre de défis, notamment en termes de responsabilités, de confidentialité, de réglementation… La CAVE de FARI apportera d’ailleurs également des réponses en la matière. L’institut rassemble en effet au sein de la VUB et de l’ULB plus de 300 experts qui mènent des recherches actives sur l’IA, les données et la robotique dans différentes disciplines, allant de l’informatique à l’ingénierie en passant par l’économie, la sociologie, l’éthique et l’expertise juridique. »