Blaton ou la Belgique d’hier, d’aujourd’hui et de demain
Dire que l’entreprise Blaton a façonné Bruxelles, et plus largement la Belgique, relève d’un doux euphémisme. On peut s’en faire une idée très concrète en parcourant le tout nouvel ouvrage «Blaton: Une dynastie de constructeurs» (édition: AAM/CIVA).
En juillet 2013, des semi-remorques, chargés des archives de l'entreprise bruxelloise de construction Blaton, créée en 1865 et toujours en activité aujourd'hui, se présentent aux portes des Archives d'Architecture Moderne (qui fait aujourd'hui partie du CIVA) à Bruxelles. Des quantités impressionnantes de plans, de dessins, d'épures y voisinent avec des notes de calcul, des fiches de paye, des devis et des correspondances; le tout abondement illustré de photographies: cathédrales de béton, arches monumentales de ponts, voûtes d'usines en majesté, coroles de hangars, poutres de garages aux portées inégalées... Sans oublier d'innombrables vues de chantiers. De ces dizaines de milliers de documents émergent, parmi d'autres, les noms d'éminents architectes et ingénieurs: Henry van de Velde, Victor Bourgeois, Jean-Jules Eggerickx, Gustave Magnel, Alfred Hardy et l’incontournable Victor Horta.
Plus de 2.000 plans du célèbre architecte font ainsi partie du legs de la famille Blaton au CIVA; un cadeau inestimable et un bonheur sans nom pour tous les spécialistes et amoureux de l’architecture puisque tout le monde pensait que ces documents étaient définitivement perdus, Victor Horta ayant détruit ses archives personnelles avant sa mort en 1947. Mais les collaborations entre l’architecte de génie et l’entrepreneur visionnaire ont été nombreuses, et l’entreprise Blaton a jalousement conservé les plans, esquisses et correspondances dont elle disposait.
70 m3 d’archives!
Mais les archives d’Horta (dont toutes celles relatives au Palais des Beaux-Arts), aussi précieuses soient-elles, ne sont qu’une goutte d’eau dans la mer. Les quatre semi-remorques qui, un jour d’été 2013, viennent confier le Fonds d’archives de l’entreprises Blaton au CIVA représente 70 m3 de papier, soit 250 mètres courant d’archives, une fois celles-ci rangées!
Un ensemble qui ouvre des perspectives inédites sur plus d'un siècle d'innovations constructives et de créations architecturales (Palais des Beaux-Arts, garage Citroën, Banque Lambert, pavillon américain à !'Exposition de Bruxelles 1958,...) et qui permet de retracer l'histoire d'une entreprise qui, depuis sa création en 1865, est restée familiale, ce qui en fait la plus ancienne société belge familiale en activité! «Et cet ancrage familial explique sans doute aussi pourquoi l’entreprise a conservé ses archives qui émargent aussi au patrimoine familial» souligne Yaron Pesztat. Conscients de l’importance de ce Fonds, les dirigeants de Blaton ont donc décidé de le confier aux bons soins du CIVA dès lors qu’ils mettaient en vente le siège historique de l’entreprise, rue du Pavillon à Schaerbeek.
Outre les archives relatives à Horta, ce Fonds abrite d’autres pépites. On y trouve, par exemple, des plans d’autres architectes, comme ceux d’Henry van de Velde pour un projet de stade de football à Anvers (candidat à l’organisation des Jeux olympiques de 1936) ou le projet d’Alexis Dumont et Marcel Van Goethem pour transformer le garage Citroën de la Place de l’Yser en immeuble à appartements.
La qualité et la diversité de ces archives ont donc conduit le CIVA à en faire un livre dont la rédaction a été confiée à trois spécialistes: Maurice Culot, Bernard Espion et Michel Provost.
Un ouvrage passionnant au gré duquel on parcourt près d’un siècle d’histoire de la Belgique à travers ses constructions les plus emblématiques, ses architectes et entrepreneurs les plus renommés et le développement de nombreuses techniques de construction et d’ingénierie.