Métro bruxellois: cap au nord
Pour des raisons techniques, géologiques et budgétaires, la construction d'une nouvelle ligne de métro n'est pas un chantier banal. C'est pourtant ce que s'apprête à faire la Région bruxelloise avec l'aide de Beliris. Face à l'explosion démographique qui attend Bruxelles, et particulièrement le nord de la capitale, cette nouvelle ligne Nord-Sud (de Haaren/Bordet à Forest) a toute sa raison d'être. Pour la mobilité et la qualité de vie des Bruxellois, mais aussi des navetteurs car l'intermodalité sera de mise.
Le métro bruxellois fête ses 40 ans avec vigueur cette année. Une belle occasion pour grandir et se déployer vers le nord de la Région. Pour l'anecdote, il transportait 5 millions de passagers par an à l'époque, ils sont 135 millions aujourd'hui. Un tram peut transporter près de 200 personnes, une rame de métro près de 800. C'est dire si le choix d'un métro est pertinent, même si d'autres pistes ont été étudiées, précise Erwin Malcorps, managing director de Sweco Belgium qui cornaque le consortium Bureau Métro Nord (Bmn) en charge du dossier (comme de celui de la nouvelle ligne 17 du grand réseau de métro parisien). Parmi elles, un doublement des lignes de tram en surface ou l'aménagement de sites propres ont été envisagés, mais sans pouvoir répondre aux besoins de mobilité qui s'annoncent, à savoir 24.400 voyageurs par heure en 2024 sur cet axe.
Au programme final de la M3: 7 nouvelles stations depuis la gare du Nord, un dépôt avec ateliers et bureaux pour le matériel roulant en fin de ligne, un nouveau tunnel de 5 km.
Tunnelier de 70 mètres
A ce jour, l'étude du tracé, certaines études géothermiques et géologiques, l'implantation du dépôt sur un terrain de la Stib, l'aménagement des stations et les méthodes constructives sont déterminées. Pour ces dernières, on recourra au «cut & cover», voire à la congélation du sol dans certains cas, pour les stations, ce qui permettra de couler la dalle supérieure rapidement et donc, de limiter au maximum l'impact en surface pour les riverains. Vu la densité des quartiers traversés, on utilisera un tunnelier de 10 m de diamètre, 70 m de long, doté de voussoirs de 40 cm d'épaisseur et creusant 7 jours sur 7 au rythme de 10 m par jour à une profondeur d'environ 30 mètres.
Budget et agenda
L'investissement est évidemment à la hauteur de la tâche. Hors matériel roulant, il est estimé à 857 millions d'euros (dont 52% par Beliris) et passe à 1,8 milliard au total avec la transformation de la ligne de pré-métro jusqu'à la gare du Nord, divers grands travaux en surface, le matériel, la nouvelle ligne,'
Comme le souhaite Pascal Smet, ministre bruxellois de la Mobilité, ce vaste chantier offre également une occasion unique d'embellir les espaces publics le long de la ligne M3, ce à quoi s'emploient notamment les architectes du projet qui imaginent 7 stations en phase avec leur quartier respectif. Des stations présentées également comme des éléments de développement urbain et dont le point commun réside dans leur trame (façon de parler'): hall d'échange, mezzanine avec divers services et quais, ceux-ci étant dotés de portes automatiques qui coulissent devant les entrées des rames. On sera en tout cas loin de l'image surannée des stations sombres et grises puisque la lumière naturelle y sera abondante et que les architectes ont privilégié le bon dimensionnement des circulations verticales, la lisibilité des flux,'
'Au programme final de la M3: 7 nouvelles stations depuis la gare du Nord, un dépôt avec ateliers et bureaux pour le matériel roulant en fin de ligne, un nouveau tunnel de 5 km.'
Dès l'instant où les moyens suivent ' il ne faudrait pas tomber dans les travers du Rer - un tel projet suppose un planning en béton. Aperçu: en février 2013, le Gouvernement bruxellois approuve le tracé général et le métro automatique (mais avec chauffeur); en mai 2014, un tracé plus précis avec 7 stations est approuvé; en mars 2015, approbation du plan directeur; à l'automne 2015, sessions d'infos pour les riverains (il s'agit de contrer l'effet Nimby); juillet 2016, approbation de l'avant-projet par les Gouvernements régional et fédéral; automne 2016, nouvelles sessions d'infos pour les riverains; janvier 2017, dépôt des demandes de permis; 2017, étude d'incidences et rédaction du cahier des charges; 2018, phase d'octroi des marchés publics; 2019, délivrance des permis et début des travaux; 2025, fin des travaux, tests et mise en service. Six ans de travaux donc, dont environ 24 mois pour la construction du nouveau tunnel, quelque 28 mois pour le génie civil des 7 stations et 51 mois pour leur parachèvement.
En 2025 et avec une fréquence des rames de 3 minutes, il devrait donc être possible de faire le trajet en métro entre Bordet (Evere) et la gare du Nord en 10 minutes et en 20 minutes entre Bordet et la station Albert au sud de Bruxelles. De quoi faire perdre à Bruxelles son statut peu enviable de 5e ville la plus embouteillée d'Europe. Certes, le chemin est encore long avant le premier coup de pioche, mais ce type de projet est par essence de longue durée. Un inconvénient largement compensé par les apports socio-économiques, comme en témoigne par exemple la ligne de métro des Docklands à Londres qui a dopé l'essor de ce quartier. Et puis, comme le suggérait le ministre Didier Reynders en charge de Beliris, pourquoi ne pas continuer sur sa lancée et prolonger la M3 vers le sud et Uccle' Après 2030 peut-être'
F.G.