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Matériau

Devagro ouvre la voie au béton neutre en CO₂ en Belgique

« 8 % », répète plusieurs fois Yves Degezelle, CEO de l’entreprise de construction Devagro. « Si on rentre de l’école avec un tel chiffre, ça ne passe pas. C’est un gros échec. Beaucoup trop peu. Mais pour nous, producteurs de béton, ce chiffre est justement beaucoup trop élevé. Il s’agit de la part du béton dans les émissions mondiales totales de CO₂, et nous voulions y remédier. » Grâce à un investissement stratégique dans une technologie de pointe, l’entreprise est la première en Belgique à proposer à ses clients du béton prêt à l’emploi neutre en CO₂.

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« Le béton est populaire dans le monde entier, car ses matières premières sont facilement disponibles », explique Yves Degezelle.

« Mais ce sont précisément ces matières premières qui expliquent l’empreinte carbone importante du béton. Pour fabriquer du béton, il faut des granulats, de l’eau, des adjuvants, des fillers et du ciment. Bien que le ciment ne représente que 13 % de la masse totale, il est responsable de 76 % des émissions totales de CO₂. Rien qu’en Belgique, en 2023, la production de 5.097.000 tonnes de ciment a généré 2.216.000 tonnes de CO₂, soit une moyenne de 434 kg de CO₂ par tonne de ciment. »

« Face à de tels chiffres, on ne peut pas rester les bras croisés.

Il existait déjà diverses méthodes permettant de réduire significativement les émissions de CO₂, mais du béton prêt à l’emploi véritablement neutre en CO₂ était jusqu’à récemment un objectif inatteignable. Nous avons donc jugé qu’un investissement dans cette voie en valait vraiment la peine. »

Ce procédé de pointe utilise le CO₂ émis par des processus industriels.

« Nous le capturons afin qu’il ne soit pas rejeté dans l’atmosphère et le transportons vers notre site de production à Waregem. Là, nous avons construit une ECO2Box, dans laquelle le gaz est chimiquement lié aux granulats. »

ECO2Box

« En tant qu’entreprise active dans la démolition, nous disposons d’un flux constant de déchets de construction et de béton », explique Lars Rius, coordinateur innovation chez Devagro.

« Dès la phase de démolition, nous séparons rigoureusement les différentes fractions. En 2024, cela représentait 800.000 tonnes de matériaux, traités dans nos installations mobiles de concassage, puis transformés en granulats de haute qualité. Ceux-ci contiennent une certaine quantité de ciment non hydraté. Dès qu’ils entrent en contact avec le CO₂, une réaction chimique se produit : le CO₂ est fixé de manière permanente sous forme de CaCO₃, c’est-à-dire de calcaire inerte. Cela renforce encore les granulats et améliore leurs propriétés mécaniques. »

« Ce n’est pas un procédé nouveau en soi. Il se produit aussi naturellement dans l’environnement. Mais grâce à notre ECO2Box, nous pouvons l’appliquer de manière intensive et à grande échelle, et ainsi retirer réellement du CO₂ de l’atmosphère. L’investissement et le développement de cette technologie ont été entièrement réalisés en interne. Je dois avouer que je suis un peu tombé amoureux de cette réalisation. »

« Ce procédé permet un double gain environnemental. D’une part, il s’agit d’une solution durable pour capter le CO₂ et contribuer à la réduction des émissions dans le secteur de la construction. D’autre part, cela permet de donner une seconde vie à d’importantes quantités de gravats provenant de la démolition.

En 2023, la Belgique a collecté 62,6 millions de tonnes de déchets, dont 40 % provenaient de fractions minérales facilement réutilisables comme granulats de qualité. »

Analyse du cycle de vie

Les propriétés fondamentales du béton ne changent pas après traitement dans l’ECO2Box.

« L’ECO2Beton satisfait à toutes les normes de qualité », assure Rius.

« Les formulations restent identiques, tout comme leurs qualités et caractéristiques. Ce qui change fondamentalement, c’est la compensation du CO₂ émis pendant la production du béton. Cela permet à nos clients de mieux contrôler l’impact environnemental total de leur projet. Dès qu’ils commandent notre ECO2Beton, nous calculons l’empreinte environnementale de leur projet via une analyse de cycle de vie (ACV). Ils ont ensuite la possibilité de compenser partiellement ou totalement les émissions liées à la production du béton et à l’extraction des matières premières. »

Vers une meilleure réutilisation des gravats

Devagro est prête à partager son expertise et sa technologie de stockage du CO₂ avec d'autres entreprises du secteur de la construction.

« Mais nous sommes bien conscients que ce procédé ne constitue qu’un maillon d’une solution globale.

Pour faire du béton un véritable matériau écologique, sans impact environnemental, des initiatives complémentaires sont nécessaires. Nous espérons que toute la chaîne jouera le jeu, à commencer par ceux qui prescrivent le béton. »

« De nouvelles méthodes de prescription, axées sur l’impact environnemental et les performances, peuvent constituer un pas décisif. Cela peut passer par des ciments à plus faible impact ou par des exigences sur l’impact environnemental global du béton. On peut aussi recourir à du ciment neutre en CO₂.

Et enfin, le réemploi de matériaux de manière plus qualitative reste un axe d’action permanent.

Aujourd’hui, les gravats de béton – qu’ils soient carbonatés ou non – sont surtout réutilisés dans des applications de moindre qualité, comme les sous-couches de fondations.

Nous continuons à viser un réemploi de haute qualité dans du nouveau béton. »


Lars Rius : « Les formulations du béton restent les mêmes, tout comme leur qualité et leurs propriétés. La différence cruciale réside dans la compensation du CO₂ émis lors du processus de production du nouveau béton. »

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