Riiot Labs: une start-up wallonne sur le Strip
La start-up liégeoise Riiot Labs a mis au point «blue», un analyseur intelligent d’eau de piscine, ce qui lui a valu de recevoir le prix «smart home» à l’occasion du Ces (Consumer Electronics Show) de Las Vegas, le plus grand salon high-tech du monde.
Créée en 2015 par deux développeurs en informatique, Benjamin Stévens (31 ans) et Julien Delarbre (28 ans), Riiot Labs évolue dans l’univers ô combien branché des objets connectés (Riiot Labs est d’ailleurs l’acronyme de «Research in Internet of Things Labs»). Un créneau au sein duquel elle s’est assignée pour mission de faciliter la vie des gens dans leur quotidien grâce à des technologies disruptives.
Et visiblement les deux néo-entrepreneurs sont doués pour capter l’air du temps. Ainsi, après avoir décroché le Prix de l’Innovation technologique à la Foire de Paris dans la catégorie «Nouveaux entrepreneurs» en avril 2016 pour leur produit «blue», puis avoir récolté un succès énorme auprès des médias et des professionnels de la piscine pour le même concept au salon Global Piscine de Lyon en novembre 2016, ils viennent donc de mettre le jury des Ces Innovation Awards dans leur poche, encore et toujours avec «blue».
Mais de quoi s’agit-il? En l’occurrence, «blue» est un analyseur de piscine intelligent qui épouse la forme d'une bouteille thermos. La tête comporte toute la partie électronique, avec notamment le microprocesseur et les connexions bluetooth. La seconde partie contient le bloc batterie et une sonde à 4 capteurs. Le tout est complètement étanche. Grâce aux capteurs développés par Riiot Labs, cet analyseur d'eau de piscine mesure, 24h/24, des paramètres tels que la température de l’eau, le pH, le niveau de chlore, etc. L’ensemble de ces données est disponible sur le smartphone de l’utilisateur via une application conçue à cet effet. Pour fonctionner, «blue» n’utilise pas internet mais les réseaux Sigfox, un standard français de communication basse fréquence pour l’Internet des objets (IoT), en pleine explosion partout en Europe, et la technologie bluetooth.
Couvé juste ce qu’il faut et comme il faut
Riiot Labs a de bonnes chances de parvenir à ses fins. Outre l’inventivité et la complémentarité de ses concepteurs, cette jeune société évolue également dans les meilleures conditions au sein de la Faktory, un incubateur de start-ups privé fondé en 2014 par l’entrepreneur belge Pierre L'Hoest, ex-Ceo d’Evs, une entreprise liégeoise spécialisée dans la fabrication de serveurs vidéo destinés à l'enregistrement d'images professionnelles. C’est d’ailleurs dans cette société que Julien Delarbre a fait ses gammes au sortir d’un baccalauréat en technologie de l’informatique.
La Faktory investit dans quatre projets par an maximum, les suit et les aide à se développer. Pour ce faire, ce fonds d’investissement dispose non seulement d’un budget conséquent qui lui permet de financer les projets à concurrence de 1 ou 2 millions d’euros si nécessaire, mais aussi d’une grande expérience et d’un indéniable savoir-faire.
Eloge de la simplicité
Riiot Labs a travaillé deux ans pour développer le produit avant d’entamer la commercialisation de «blue» à l’occasion du salon Piscine Global de Lyon qui avait lieu du 15 au 18 novembre 2016. Un lieu et un moment qui n’ont rien d’anodin puisque cet événement attire chaque année plus de 15.000 visiteurs, faisant de Lyon la capitale mondiale de la piscine.
Là, la simplicité de la solution (laquelle ne demande aucune installation puisque «blue» flotte) a fait sensation. Résultat: en moins deux jours, Riiot Labs avait déjà explosé ses prévisions de vente pour toute la durée du salon et noué de nombreux contacts avec des fabricants et installateurs de piscines aussi bien en Europe qu’aux Etats-Unis et jusque dans le Golfe persique.
Les deux néo-entrepreneurs ont pu y voir la confirmation que «blue» répondait à un vrai besoin, loin de certains gadgets qui caractérisent l’univers encore balbutiant de l’IoT.
L’Internet des objets: une plus-value aussi pour les entreprises et l’industrie
L’Internet des objets semble en tout cas appelé à un avenir grandiose. Le Ces de Las Vegas a constitué un bon baromètre à cet égard tant les dispositifs IoT pour la maison et le bureau étaient nombreux et variés. Une vraie folie! Et ce n’est sans doute qu’un début: le cabinet d’étude Gartner Inc. prévoit que 50% des nouveaux processus et systèmes d’affaires intégreront des éléments IoT d’ici 2020.
Mais à qui est destiné l’IoT? Et en quoi constitue-t-il une valeur ajoutée? «Il y a souvent une mauvaise perception de ce qu’il y a derrière l’IoT, que l’on traduit aussi communément par «objets connectés», donc en BtoC. On oublie que l’énorme potentiel du secteur est de mettre des capteurs partout, pour les industries notamment, et d’en faire un service à forte valeur ajoutée, soit pour le consommateur final, soit pour l’entreprise elle-même», explique-t-on chez Sigfox, un opérateur télécom français de l’Internet des objets dont la technologie radio Unb (ultra narrow band) lui a permis de bâtir un réseau cellulaire bas débit économe en énergie. Riiot a précisément opté pour ce réseau basse consommation profitant d'une très bonne pénétration (le réseau cellulaire de Sigfox comporte 1.300 antennes et l'opérateur a fait part de sa volonté de s'étendre en Afrique et au Moyen-Orient) et dont la portée est très étendue.
Le «blue» embarque également une connexion Bluetooth pour un transfert de données immédiat. Grâce à cette connexion, il évalue les conditions météorologiques de la journée pour que le propriétaire de la piscine puisse prendre toutes les précautions nécessaires. L'utilisateur reçoit ainsi des alertes en temps utile et bénéficie en outre de nombreux conseils personnalisés sur l'entretien de sa piscine. Une technologie embarquée qui explique peut-être le prix, 449 euros auxquels il faudra ajouter les frais de remplacement du capteur et de la batterie dont la durée de vie est de deux ans environ (et malheureusement, aucune recharge n'est possible dans l’intervalle).
Riiot Labs va maintenant intensifier le développement commercial en espèrant, dans un premier temps, se positionner sur le marché européen – essentiellement français pour commencer – avant de se faire une place au soleil des Etats-Unis.
Adie Frydman